Comment reboiser de façon rapide et peu onéreuse ces pentes avalancheuses où la forêt ne peut se régénérer de façon naturelle? L'Institut fédéral de recherches forestières (IFRF) et l'Institut fédéral pour l'étude de la neige et des avalanches (ENA), devenus en 1989 Institut fédéral de recherches sur la forêt, la neige et le paysage (FNP), ont réalisé une expérience éclairante à ce propos.

L'afforestation expérimentale du Stillberg près de Davos a 20 ans

En 1975, 92 000 jeunes arbres ont été plantés sur une pente raide, le Stillberg près de Davos. Au début, arolles, pins à crochets et mélèzes formaient un échiquier tricolore. Mais en 1995, la pente ressemblait un tapis rapiécé avec des morceaux de terre, les uns complètement dénudés, les autres partiellement boisés et les troisièmes riches d'une végétation luxuriante. Si les mélèzes dominent dans le paysage, une grande partie des arolles et pins à crochets n'ont pas résisté. Leur mort est principalement due aux champignons.

Le déneigement, un facteur clé

Trois facteurs déterminent la survie et la croissance des arbres du Stillberg:

  • les températures en été
  • l'enneigement en hiver
  • le déneigement au printemps

La date du déneigement semble être le facteur principal. Là où la neige disparaît relativement tôt au printemps, les arbres résistent bien. Les taux de survie diminuent rapidement avec l'augmentation de la durée d'enneigement. Dans les creux à neige prononcés, les arbres ont presque tous péri, à cause des champignons.

Cela signifie en pratique qu'une zone potentiellement reboisable devrait être observée durant la fonte des neiges. Les milieux les premiers déneigés, et donc les plus favorables, devraient être peuplés d'arbres disposés en groupes alors qu'il serait préférable de renoncer à planter là où la neige tarde à disparaître. Les groupes densément peuplés forment, en l'espace de quelques années, un collectif à l'intérieur duquel les arbres se protègent mutuellement contre les extrêmes climatiques et la dent du gibier.

Les couloirs à avalanches

Les endroits situés dans les couloirs à avalanches ne sont généralement pas boisés, même pas de façon naturelle. Si l'on veut que des arbres s'implantent dans ces lieux, il est nécessaire d'installer des ouvrages de protection dans les zones de départ d'avalanches. Le revers de la médaille: aux abords des paravalanches, la neige s'accumule et les arbres ont plus de peine à survivre. Voilà pourquoi on ne manquera pas de se demander, avant de reboiser, s'il est possible de planter d'abord et d'installer ultérieurement des ouvrages temporaires. Ces derniers devront alors stabiliser le manteau neigeux jusqu'à ce que les arbres soient assez forts pour assumer cette fonction. Bien sûr cette théorie n'est valable que dans les zones où aucune infrastructure n'est mise en danger et où il n'est donc pas nécessaire de prendre des mesures immédiates contre les avalanches.

La phase principale des travaux du Stillberg est achevée certes; mais il reste encore beaucoup à découvrir ces prochaines années. Il faudra étudier entre autres si et comment la hauteur des arbres a une incidence sur la répartition de la neige, sur sa fonte au printemps et sur la fréquence des avalanches.

En outre, l'aire expérimentale du Stillberg restera ouverte aux chercheurs et praticiens qui désireront venir voir comment les conditions du milieu influent sur une afforestation. L'essai est concluant: les conditions de vie offertes aux arbres peuvent être foncièrement différentes d'un milieu à l'autre et ces changements s'observent sur un espace de quelques mètres. Il suffit d'avoir vu comment l'échiquier du Stillberg s'est désagrégé en 20 ans pour comprendre que la nature ne peut être schématisée mais qu'elle se compose de multiples microstations où les processus naturels sont à utiliser au mieux. Cette approche permettra de gagner du temps et de l'argent.

Littérature

  • Senn J., Schönenberger W. (2001). Zwanzig Jahre Versuchsaufforstung 'Stillberg': Überleben und Wachstum einer subalpinen Aufforstung in Abhängigkeit vom Standort. Schweizerische Zeitschrift für Forstwesen 152, 226-246.